Les polymères sont régulièrement associés aux matières synthétiques, plastiques et fossiles. Pourtant ils sont présents dans la nature et utilisés par l’Homme depuis la nuit des temps. En effet, la soie, les protéines ou la cellulose sont tous des polymères naturels. Ainsi, de nombreux consommateurs ignorent que leurs produits cosmétiques contiennent des polymères et surtout, que ces derniers peuvent être d’origine naturelle ! Adrien Faure expert chez PolymerExpert fait le point sur l’utilisation des polymères dans l’industrie cosmétique.
Bien que les termes « Polymère » et « Naturalité » puissent sembler antagonistes, ils constituent le cœur de métier de nombreuses équipes de recherche et développement, ainsi que d’industriels conscients des nouveaux défis environnementaux et sociétaux. PolymerExpert a pris le parti dès 2014 de développer des polymères biosourcés pour promouvoir des produits respectueux de l’environnement et de la santé des consommateurs.
On retrouve aujourd’hui les polymères dans la majorité de nos produits cosmétiques car ils possèdent des performances remarquables et inégalées. Ces macromolécules sont essentielles à l’élaboration de formules cosmétiques puisqu’elles ont été conçues pour développer des produits optimisés en termes de rhéologie, de sensorialité et de stabilité. Les propriétés mécaniques des formules sont souvent obtenues par l’utilisation des polymères.
La notion de naturalité en cosmétique, fait référence à la norme ISO16128 qui établit les lignes directrices permettant de définir la qualification et le degré de naturalité d’un ingrédient. Il peut soit être qualifié de naturel, d’origine naturelle ou synthétique. Depuis quelques années, la norme ISO 16128 est devenue le référentiel absolu de la naturalité de nos produits cosmétiques et permet aux fabricants de revendiquer un pourcentage d’origine naturelle sur leurs produits cosmétiques.
D’autres certifications existent pour garantir une utilisation responsable des ressources naturelles. Parmi elles, figure la certification COSMOS qui atteste de l’absence d’ingrédients pétrochimiques et qui assure l’utilisation de procédés de production et de transformation respectueux de l’environnement et de la santé humaine.
Aujourd’hui, la naturalité est un prérequis pour beaucoup de consommateurs qui sont de plus en plus soucieux de la préservation de la planète et conscients des dangers de certaines substances chimiques sur leur santé. Cet engouement – largement partagé par les marques de produits cosmétiques – a donc un impact fort sur les fournisseurs de matières premières, qui aujourd’hui, doivent innover au service de la protection de la santé et de l’environnement. De plus, l’explosion des applications qui décryptent et évaluent les produits finis et leurs compositions a contribué à mettre sur la sellette un grand nombre d’ingrédients ; en particulier les polymères d’origine pétrochimique. Parmi les plus décriés et les plus connus des consommateurs, il est aisé de citer les « PEG » (polyéthylène glycol), des polymères synthétisés à partir d’éthylène glycol. Les PEG sont des ingrédients globalement sûrs pour le consommateur et possèdent de nombreux atouts en cosmétique. Ils sont par ailleurs très largement utilisés dans les produits pharmaceutiques et dispositifs médicaux. Ils peuvent par exemple être de bons émulsionnants ou de bons solubilisants. Malheureusement, leur origine pétrochimique et leur manque de biodégradabilité ne répondent plus aux exigences de protection et de préservation de l’environnement et des ressources. C’est pour cela que l’industrie cosmétique les abandonnent peu à peu. Ainsi, nous pouvons nous demander : Est-il possible pour la filière cosmétique de se passer des polymères ? Comment remplacer ces supers ingrédients aux performances uniques, dans les formules ?
Depuis quelques années, le grand défi des formulateurs est d’effectuer une transition douce vers des polymères de plus en plus naturels et éco-responsables. Les ingrédients dérivés de ressources fossiles sont progressivement substitués par des ingrédients issus de ressources renouvelables. L’inconvénient majeur pour les formulateurs lors de la substitution d’un polymère de synthèse par un polymère naturel est la potentielle perte en efficacité. Les polymères occupent souvent un rôle clé dans une formule : ils sont gélifiants, émulsionnants, stabilisants ou même agents de tenue, en d’autres mots, des piliers des produits cosmétiques. C’est pourquoi il faut repenser tous les systèmes de formulation. En ce qui concerne les produits de soin, le travail de substitution des matières premières d’origine pétrochimique et de transition vers des ingrédients plus naturels a été une réussite pour l’industrie cosmétique qui a su trouver des solutions prometteuses. En revanche, le secteur du maquillage peine à entamer sa transition car le succès des produits de maquillage réside dans la performance technique du produit qui s’appuie en grande partie sur les polymères synthétiques aux propriétés sensorielles et filmogènes aujourd’hui inégalées.
Afin d’allier la performance à la naturalité, les formulateurs ont donc deux possibilités. Tout d’abord, ils peuvent utiliser des polymères naturels utilisés et connus depuis longtemps en cosmétique, comme les polysaccharides tels que la gomme xanthane ou les alginates pour leur rôle de gélifiant. D’autre part, ils peuvent se tourner vers des polymères d’origine naturelle synthétisés en partie en utilisant des monomères d’origine naturelle ou des polymères naturels modifiés selon une liste de réactions chimiques permises qui ne compromettent pas la naturalité. C’est grâce à cette seconde approche que les fournisseurs de matières premières tentent d’égaler les performances des polymères d’origine pétrochimique existants.